Le calendrier républicain, ou calendrier révolutionnaire français, est un calendrier créé pendant la Révolution française et utilisé de 1792 à 1806, ainsi que brièvement durant la Commune de Paris. Il entre en vigueur le 15 vendémiaire an II (), mais débute le 1er vendémiaire an I (), jour de proclamation de la République, déclaré premier jour de l'« ère des Français ».
Comme le système métrique, mis en chantier dès 1790, ce calendrier marque la volonté des révolutionnaires d'adopter un système universel s’appuyant sur le système décimal, qui ne soit plus lié à la monarchie ou au christianisme[1], en remplacement du calendrier grégorien. Outre le changement d'ère (renumérotation des années), il comprend un nouveau découpage de l'année, et de nouveaux noms pour les mois et les jours.
L'année du calendrier républicain était découpée en douze mois de trente jours chacun (soit 360 jours), plus cinq jours complémentaires les années communes ou six les années sextiles, ajoutés en fin d'année, de sorte que son année moyenne de 365,242 25 jours soit plus proche de l'année tropique (environ 365,242 189 8 jours) que ne le sont les calendriers julien (365,25 jours) et grégorien (365,2425 jours).
Ce calendrier républicain permettait en particulier de supprimer les nombreuses fêtes chômées de l'Ancien Régime, et de remplacer le jour de repos dominical par un jour de repos décadaire, ce qui n'était pas sans conséquences pour les ouvriers (à l'instar de la loi Le Chapelier qui en 1791 avait déjà interdit les corporations et toute association d'ouvriers).
La correspondance des dates plus bas, est donnée à titre indicatif. En effet, elles varient légèrement d'une année à l'autre. Une correspondance détaillée est donnée aux articles an I à an XIV.
L’invention de ce calendrier se fit progressivement. Le , les députés de la Convention, réunis pour la première fois, décidèrent à l'unanimité par acclamation de l'abolition de la royauté en France et le lendemain (jour anniversaire de l'adoption du premier article de la Constitution de 1789[2]), la Convention nationale décréta que « Tous les actes publics sont désormais datés à partir de l'an I de la République ». C’est le que Charles-Gilbert Romme, rapporteur du groupe de travail nommé par le Comité d'instruction publique, présente devant la Convention (le Comité lui-même ayant eu droit à une présentation six jours auparavant) ce qui deviendra bientôt le calendrier républicain. Après certains ajustements, il entra en vigueur à partir du lendemain du décret de la Convention nationale du 14 vendémiaire an II ()[3],[Note 1].
La nomenclature des mois et des jours continua d’évoluer dans les mois qui suivirent. Le décret fut refondu le 4 frimaire an II (), qui donna sa forme définitive au calendrier. Ce dernier décret abolit l'« ère vulgaire » pour les usages civils et définit le comme étant le premier jour de l'« ère des Français ». Pour les années suivantes, le premier jour de l'année serait celui de l'équinoxe vrai à Paris (ce qui tombait entre le 22 et le selon le calendrier grégorien). La première année est l'an I ; il n'y a donc pas d'année zéro.
L'organisation du nouveau calendrier a été créée par une commission formée de Gilbert Romme et de Claude Joseph Ferry, qui demandèrent que Charles-François Dupuis leur soit adjoint. Ils associèrent Louis-Bernard Guyton-Morveau, Joseph-Louis Lagrange, Joseph Jérôme Lefrançois de Lalande, Gaspard Monge et Alexandre Guy Pingré à leurs travaux. Gilbert Romme fut le rapporteur de la commission, et c'est à ce titre que la création du calendrier républicain lui est généralement attribuée[4].
Les noms des mois et des jours furent conçus par le poète Fabre d'Églantine avec l'aide d'André Thouin, jardinier du jardin des plantes du muséum national d’histoire naturelle. Chaque nom de mois rappelle un aspect du climat français (décembre, nivôse en rapport avec le thème de la neige) ou des moments importants de la vie paysanne (septembre, vendémiaire, les vendanges). Chaque jour était caractérisé par le nom d'un produit agricole, d'une plante, d'un animal ou d'un outil en lieu et place des noms de saints du calendrier traditionnel[5]. De ce fait, ce calendrier, que ses concepteurs voulaient « universel », était fortement lié à son pays d'origine et au poids économique que représentaient les activités agricoles à l'époque[6].
En 1796, Louis Lafitte fournit douze dessins du Calendrier républicain. Il produit aussi des décorations peintes sur papier huilé, destinées à être éclairées et vues par transparence.
L'année du calendrier républicain était découpée en douze mois de trente jours chacun (soit 360 jours), plus cinq (ou six jours les années bissextiles) ajoutés en fin d'année pour qu'elle reste alignée avec l'année tropique (environ 365,242 189 8 jours pour l'année tropique contre 365,242 25 jours pour l'année du Calendrier républicain). Chaque mois était découpé en trois décades. La journée devait être découpée suivant le système décimal « de minuit à minuit » ; elle comportait dix heures découpées en dix parties elles-mêmes décomposables en dix parties, ainsi de suite « jusqu’à la plus petite portion commensurable de la durée ». Cette division décimale de la journée ne fut jamais appliquée et fut abolie en 1795 (entre l'an III et l'an IV). La notion de mois, attachée au cycle lunaire, est donc conservée mais celle de semaine, considérée comme d'origine biblique, même si elle correspond grossièrement à un quart du cycle lunaire, disparaît.
Le calendrier a produit des années sextiles (contenant six jours complémentaires - les « sanculottides ») les années III, VII, et XI par ajout d'un jour à la fin de l'année, donc un sixième jour complémentaire. Ce jour s'appelait le « jour de la Révolution », qui marquait la fin d'une franciade et qu'on célébrait comme une fête nationale.
Les six jours complémentaires de fin d'année, parfois appelés sans-culottides ou sanculottides :
Chaque mois est divisé en trois décades[7] (semaines de 10 jours), et chacun des jours porte chronologiquement les noms suivants : Primidi[8], Duodi, Tridi, Quartidi, Quintidi, Sextidi, Septidi, Octidi, Nonidi et Décadi.
Chaque jour de l'année a un nom propre, les noms des saints du calendrier grégorien ayant été remplacés par des noms de fruits, de légumes, d'animaux, d'instruments, etc.[9]
Les quintidis ont reçu des noms d'animaux communs (pas forcément domestiques : lièvre), tandis que les décadis prenaient des noms d'instruments paysans[10].
« L'idée première qui nous a servi de base, est de consacrer, par le calendrier, le système agricole, & d'y ramener la nation, en marquant les époques & les fractions de l'année par des signes intelligibles ou visibles pris dans l'agriculture & l'économie rurale. (…)
Le calendrier étant une chose à laquelle on a si souvent recours, il faut profiter de la fréquence de cet usage, pour glisser parmi le peuple les notions rurales élémentaires, pour lui montrer les richesses de la nature, pour lui faire aimer les champs, & lui désigner, avec méthode, l'ordre des influences du ciel & des productions de la terre.
Les prêtres avaient assigné à chaque jour de l'année, la commémoration d'un prétendu saint : ce catalogue ne présentait ni utilité, ni méthode ; il était le répertoire du mensonge, de la duperie ou du charlatanisme.
Nous avons pensé que la nation, après avoir chassé cette foule de canonisés de son calendrier, devait y retrouver en place tous les objets qui composent la véritable richesse nationale, les dignes objets, sinon de son culte, au moins de sa culture ; les utiles productions de la terre, les instruments dont nous nous servons pour la cultiver, & les animaux domestiques, nos fidèles serviteurs dans ces travaux ; animaux bien plus précieux, sans doute, aux yeux de la raison, que les squelettes béatifiés tirés des catacombes de Rome.
En conséquence, nous avons rangé par ordre dans la colonne de chaque mois, les noms des vrais trésors de l'économie rurale. Les grains, les pâturages, les arbres, les racines, les fleurs, les fruits, les plantes, sont disposés dans le calendrier, de manière que la place & le quantième que chaque production occupe est précisément le temps & le jour où la nature nous en fait présent. »
— Fabre d'Églantine, Rapport fait à la Convention nationale, dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française, au nom de la Commission chargée de la confection du Calendrier[6], Imprimerie nationale, 1793
Les 12 planches ci-dessous sont gravées par Salvatore Tresca d'après Louis Lafitte, vers 1797-1806.
Productions nationales et instruments ruraux associés aux mois d’automne (vendémiaire, brumaire, frimaire)[11] :
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Productions nationales et instruments ruraux associés aux mois d’hiver (nivôse, pluviôse, ventôse)[12] ,[13] :
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Productions nationales et instruments ruraux associés aux mois du printemps (germinal, floréal, prairial)[14] :
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Productions nationales et instruments ruraux associés aux mois d’été (messidor, thermidor, fructidor)[15] :
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Duodi
22
Frimaire
CCXXVIII
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Duodi, 22 Frimaire an 228 |
Duodi, 22 Frimaire an CCXXVIII |
Le calendrier républicain a été abrogé par un sénatus-consulte impérial le 22 fructidor an XIII (). Il fixe le retour au calendrier romain (grégorien) au 11 nivôse suivant (). Le calendrier révolutionnaire a donc été appliqué durant 12 ans, 2 mois et 27 jours[16]. Avant même la date de promulgation de l’abrogation, le calendrier révolutionnaire était peu utilisé. Antoine-Claire Thibaudeau écrit « malgré la promesse solennelle faite par le gouvernement consulaire de conserver le calendrier républicain comme une conquête faite sur le fanatisme on ne s’en servait presque plus pour les actes publics. Dans les relations sociales le calendrier romain avait été remis en usage[17]… »
Il y a au moins trois options quant à l'évolution future des années sextiles si le calendrier était resté en vigueur.
Deux options peuvent être compatibles avec le Système Romme :
Une option consiste à privilégier l'article III sur l'article X du décret[19] de la Convention :
Ces options sont utilisées dans des logiciels permettant l'affichage d'un calendrier républicain sur ordinateur ou smartphone.
Le 22 fructidor an XIII (), Napoléon signa le sénatus-consulte qui abrogea le calendrier républicain et instaura le retour au calendrier grégorien à partir du .
Le calendrier républicain fut cependant brièvement réutilisé pendant la Commune de Paris, notamment par le Journal officiel dans ses éditions du 26 floréal au 4 prairial an LXXIX (16-)[20]. D'autre part, le philosophe grec Theóphilos Kaíris s'en est inspiré pour son calendrier théosébiste, dans les années 1830.
Même après le rétablissement définitif du calendrier grégorien, certains militants ou écrits d'extrême-gauche ont continué d'utiliser le calendrier révolutionnaire, au moins en double.
Un autre legs du calendrier révolutionnaire est un certain nombre de prénoms tirés du calendrier et passés dans l’usage courant (voir catégorie:prénom révolutionnaire), et l’usage du deuxième prénom qui se répand dans toutes les couches sociales[21].
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Les chiffres des années sont cliquables et donnent une année complète. |